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Le magazine de la conférence “Entre idéaux et pratiques” est désormais publié
Le Projet
Événements universitaires accessibles: meilleures pratiques et apprentissages
Panel 4: Identités professionnelles en contextes postcoloniaux, avec une interprétation LSQ
Panel 8: Cultures journalistiques et langues, avec une interprétation LSQ
Les inscriptions sont désormais ouvertes pour « Entre idéaux et pratiques : La performance du rôle journalistique en période de transformation ».
Pré-conférence à Toronto, #jrp2023
Balado JRP Canada – 2e épisode
Balado JRP Canada – 1er épisode
L’AVENIR DU STORYTELLING NUMÉRIQUE : APERÇU DE L’ÉTUDE JRP
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Nicole Blanchett

Nicole Blanchett

Nouvelles

L’AVENIR DU STORYTELLING NUMÉRIQUE : APERÇU DE L’ÉTUDE JRP

by Nicole Blanchett June 14, 2022
written by Nicole Blanchett

L’avenir de la narration, ou storytelling, numérique est intrinsèquement lié à l’utilisation des données d’audience, et cela conduit à une fragmentation de l’audience. 

J’étudie l’utilisation des mesures et des analyses depuis des années. Mes récentes conversations avec des journalistes s’inscrivent dans une étude plus large intitulée Journalistic Role Performance (JRP). En coopération avec 36 autres pays du Nord et du Sud, nous examinons l’écart potentiel entre les idéaux et la pratique journalistiques par le biais d’une analyse de contenu de dizaines de milliers d’articles provenant de multiples plateformes et d’une enquête auprès de milliers de journalistes. 

Au Canada, nos sites d’étude sont le Globe and Mail, le Toronto Star et le National Post ; les bulletins d’information télévisés nationaux de CBC, CTV et Global ; le site Web d’information de CBC et le HuffPost Canada, aujourd’hui fermé ; The World at Six, diffusé à la radio de CBC ; et nos sites d’étude français, La Presse, TVA Nouvelles et L’heure du monde d’ICI Première Radio-Canada. 

Toutes les organisations ont une présence numérique. Les journalistes ne travaillent pas seulement à la télévision, dans la presse écrite ou à la radio, ils contribuent à de multiples plates-formes, souvent avec un accent particulier sur la diffusion numérique. Et les données accessibles grâce à la diffusion numérique changent ce qui se passe dans les salles de presse. 

Diverses mesures influencent l’élaboration des articles, qu’il s’agisse de mesures de trafic comme le nombre de pages vues, qui donnent aux organisations une idée de l’intérêt général suscité par un article – et qui restent liées à des mécanismes publicitaires tels que les impressions de page – ou encore de mesures comme le temps passé sur une page, qui concernent davantage l’engagement, ou la manière dont les gens interagissent avec le contenu produit. 

Segmentation de l’audience

De plus en plus, les organismes de presse orientent leur contenu vers leurs lecteurs fidèles, au lieu de compter sur un public plus large comme principale source de revenus, et le contenu créé pour ces lecteurs fidèles est souvent placé derrière un mur payant. Cela signifie que différents segments d’un public n’ont pas le même accès aux articles d’une organisation donnée – et que différents contenus peuvent être proposés à différents lecteurs, en fonction de leur comportement passé, de ce qu’un algorithme détermine comme étant susceptible de les intéresser, ou de la manière dont le contenu peut rapporter de l’argent.

Ce changement concernant les revenus numériques signifie que de nombreuses organisations se concentrent sur les abonnés plutôt que sur les lecteurs de passage. Ainsi, les lecteurs fidèles sont considérés comme plus importants et des mesures telles que les conversions, ou l’identification du contenu avec lequel une personne a interagi avant de devenir un abonné, peuvent être plus significatives que les pages vues – bien que les pages vues continuent d’être un marqueur important pour les ventes de publicité et un indicateur de succès facile à comprendre. 

Lors d’une conversation avec des experts de l’American Press Institute, il a été noté que les organisations de médias «segmentent » les audiences et prêtent attention à plusieurs mesures pour différentes raisons, même au sein de ce qui aurait été considéré auparavant comme une seule audience. Il dispose d’un outil qui permet de créer des scores d’engagement mixtes en fonction de différents objectifs pour ces segments d’audience. 

Pour certains articles destinés à obtenir un trafic plus large, le nombre de pages vues peut être plus important, tandis que pour le contenu créé pour les lecteurs fidèles, le temps passé et la conversion peuvent être plus importants. Les organisations peuvent accorder plus ou moins d’importance à des mesures spécifiques pour des segments d’audience spécifiques, en fonction de la manière dont chaque type d’audience peut générer des revenus et/ou en tant que mesure du succès.

L’impact de la logique médiatique

Sur l’un des sites que nous avons étudiés, le Toronto Star, la plupart des contenus sont payants, mais certains articles contiennent ce qu’ils décrivent comme des liens affiliés qui semblent être en accès libre. Si un lecteur suit un lien vers un produit intégré à l’un de ces articles et achète ce produit, le Star perçoit des revenus. 

Un participant à l’étude a noté que ces articles étaient généralement des articles sur le style de vie rédigés par des pigistes, mais il a également noté qu’il pourrait être difficile pour les lecteurs de les distinguer de tout autre article. Sans rapport avec l’étude de la CEC, Vinay Menon, chroniqueur au Toronto Star, a écrit : «Je glousse toujours, puis je maudis mes suzerains, les Dieux de la farce, lorsque quelqu’un s’énerve à propos d’une chronique que j’ai écrite et me demande : «En quoi est-ce une nouvelle ? Ce n’est pas une nouvelle ! Qui a dit que c’était une nouvelle ? » » 

Des études montrent que les lecteurs ont du mal à faire la différence entre un contenu payant, sponsorisé, voire idéologique, et les vraies nouvelles, et que même l’utilisation de descriptions dans l’article pour montrer clairement l’intention de l’article (ce que fait le Star) a un impact limité sur la crédibilité perçue des nouvelles.  

Lorsque quelque chose «ressemble » à une nouvelle pour un lecteur/téléspectateur, elle sera souvent perçue comme une nouvelle, résultant de la logique médiatique. Les définitions que les journalistes et les universitaires appliquent au journalisme n’ont pas nécessairement de sens pour le public. 

Le marketing dans la salle de presse

L’entreprise HuffPost Canada, aujourd’hui fermée, a également montré comment des processus autrefois cloisonnés dans le monde du marketing ou de la publicité se transposent dans les salles de rédaction numériques. Il a mis au point un système dans lequel les rédacteurs devaient choisir pour qui ils écrivaient avant de commencer un article, avec des profils de lecteurs imaginaires créés à partir des données d’audience : Adela pour les « jeunes milléniaux », Adam pour les « milléniaux moyens » et Diana pour les femmes de 50 à 60 ans. 

Un participant a décrit cette pratique comme du « marketing classique de magazine » où l’on choisit un « entonnoir d’audience ». Cette pratique visait à renforcer le fait qu’aucun article ne s’adressait à tout le monde et qu’il fallait parier sur les personnes les plus susceptibles de le lire. Lorsqu’un article était terminé, l’équipe chargée de l’engagement de l’audience disposait d’une liste de contrôle de ce qu’il fallait faire pour que l’article soit le plus visible possible, y compris s’il devait être posté sur Facebook et Twitter et présenté à des agrégateurs d’actualités tels qu’Apple, qui pousseraient l’article en utilisant leurs propres algorithmes. Lors de mes précédentes recherches, j’ai vu des processus similaires d’amplification du contenu utilisés dans des rédactions au Canada, en Angleterre et en Norvège.

Bien que les médias sociaux jouent un rôle majeur dans la diffusion des articles pour de nombreux médias et que les journalistes soient souvent censés, ou du moins encouragés, à développer leur propre marque et à promouvoir leur propre travail, cela peut prendre énormément de temps et exposer les journalistes à des abus toxiques en ligne, en particulier ceux qui sont racisés, LGBTQ+ et les femmes.

Un dilemme de longue date, avec une touche de données

Pour survivre, les rédactions doivent trouver de nouvelles sources de revenus et explorer de nouvelles façons de raconter des histoires. Les données d’audience peuvent contribuer à ce processus, et ce n’est pas toujours une mauvaise chose. Elles peuvent conduire à une narration innovante et à une plus grande participation et contribution du public sur les aspects que les rédactions devraient prendre en compte dès la phase de développement des histoires. 

Mais, comme l’ont noté les chercheurs du Reuters Institute of Journalism, les personnes qui pourraient bénéficier le plus d’une bonne information y ont le moins accès, parce qu’elles ne peuvent ou ne veulent pas payer pour ce qui se trouve derrière un mur payant, ou parce que les organismes de presse ne voient aucun avantage financier à essayer de les atteindre. Les meilleures nouvelles sont souvent élaborées pour des publics qui sont déjà bien desservis, et blancs. 

En outre, bien que tous les sites d’information doivent explorer différents mécanismes de revenus, le fait que ce qui pourrait être considéré comme le contenu le plus instructif soit payant, alors que le contenu qui a moins d’impact est entièrement accessible, soulève des questions cruciales en ce qui concerne l’éthique journalistique et l’objectif primordial du journalisme qui est d’informer le public.

Développer les meilleures histoires numériques, mettre en oeuvre les meilleurs mécanismes pour gagner de l’argent à partir des histoires numériques, et appliquer les meilleures pratiques éthiques en ce qui concerne le partage du contenu, tout cela n’est pas toujours facile à concilier – mais c’était déjà le cas à l’ère prénumérique, voire à toutes les époques du journalisme. La grande différence aujourd’hui est l’impact étendu et direct des données sur la façon dont les histoires sont façonnées, promues et partagées. 

Traduction: Colette Brin, assistée par DeepL.com

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Nouvelles

IDÉAUX OU PRATIQUE : LES RÔLES COMPLEXES DES JOURNALISTES MODERNES

by Nicole Blanchett June 14, 2022
written by Nicole Blanchett

Le projet sur la performance des rôles journalistiques (Journalistic Role Performance, ou JRP) examine l’évolution des pratiques journalistiques au cours d’une période de profondes perturbations pour les organismes de presse.

Y a-t-il une différence entre les idéaux auxquels les journalistes croient et la façon dont ils pratiquent leur métier ? Et, si c’est le cas, qu’est-ce que cela signifie pour les travailleurs des médias et les contenus journalistiques ? C’est ce qu’explore une équipe de chercheurs de 47 pays, dont le Canada, dans le cadre du projet JRP.

La définition du journalisme et du travail journalistique étant actuellement remise en question un peu partout dans le monde, la responsable internationale du projet estime que la diffusion de cette étude arrive à un moment crucial. 

« Il est fondamental de comprendre comment et pourquoi les rôles journalistiques sont exercés dans le monde entier en ce moment où la profession, ses pratiques et sa crédibilité sont de plus en plus remises en question », a déclaré Claudia Mellado, professeure à la Pontificia Universidad Católica de Valparaíso au Chili.

Au-delà des rôles définis par l’industrie, tels que la couverture d’un secteur particulier, le projet JRP examine la performance des rôles journalistiques à l’aide de trois catégories d’indicateurs : la présence de la voix du ou de la journaliste dans l’article ; la relation entre le ou la journaliste et le média avec les pouvoirs économiques et politiques ; et enfin, la relation du journaliste avec le public – est-il considéré comme un citoyen à informer et à soutenir ou comme un client à qui il faut vendre quelque chose ? 

Pour l’analyse, les rôles journalistiques sont au nombre de  six. Le premier est le rôle interventionniste, où un journaliste prend parti ou encourage une action dans le cadre d’un reportage. Les deuxième et troisième rôles concernent les relations de pouvoir – le rôle du chien de garde inclut la critique du gouvernement, tandis que celui du facilitateur loyal soutient les récits du gouvernement. La relation avec le public est au centre des trois derniers rôles : dans le rôle de service, les journalistes couvrent tout, des conseils aux consommateurs aux recommandations en matière de soins de santé ; dans le rôle d’infodivertissement, ils créent un contenu qui vise davantage à divertir qu’à informer ; et dans le rôle civique, ils mettent le point de vue et les droits des citoyens au premier plan de la couverture. 

La présente étude constituede la deuxième vague du projet JRP. La première s’est déroulée de 2013 à 2018, avec des chercheurs de 18 pays se concentrant sur le journalisme de presse écrite. Un livre récent sous la direction de Mellado, Beyond Journalistic Norms,  met en lumière les conclusions de la première vague et propose des explications des différences entre les conceptions normatives exprimées par les journalistes et leurs pratiques réelles révélées par l’analyse de contenu. 

Les sites d’étude au Canada comprennent CBC.ca, huffingtonpost.ca, La Presse, le Globe and Mail, le Toronto Star, le National Post et les émissions de Radio-Canada, CTV et Global. Tout au long de l’année 2020, pendant 14 jours différents, les chercheurs ont recueilli des milliers d’histoires produites par ces organes d’information, et des milliers d’autres ont été recueillies auprès d’autres organes d’information par des chercheurs du monde entier. Toutes les histoires sont analysées à l’aide d’un livre de codes partagé par l’équipe mondiale, ce qui permet une comparaison entre les pays des similitudes et des différences dans la prévalence des rôles journalistiques dans le contenu des nouvelles sur différentes plateformes médiatiques. En outre, les équipes de recherche internationales dénombrent et analysent les contenus journalistiques liés à la COVID-19. 

Une enquête anonyme a également été réalisée auprès de centaines de journalistes au Canada, et à des milliers dans le monde. L’enquête pose des questions spécifiques quand aux différents rôles journalistiques, mais aussi sur des aspects pratiques comme l’utilisation de métriques et de données analytiques dans les salles de rédaction ainsi que le degré d’autono

mie des journalistes dans le choix des sujets abordés. Les résultats de l’enquête seront comparés à l’analyse de contenu pour aider à déterminer les écarts entre les idéaux et la pratique.

Par exemple, la plupart des journalistes vous diront qu’une partie essentielle de leur travail consiste à demander des comptes aux personnes au pouvoir. Mais malgré l’importance accordée à cette fonction, les coupes sombres dans les salles de rédaction font qu’il y a moins de journalistes qui ont le temps ou les ressources pour l’exercer. En outre, l’évolution des pratiques conduit à de nouvelles priorités et définitions de ce qu’est le journalisme. 

Un rédacteur chargé des interactions avec le public participant à l’étude canadienne a insisté sur le fait qu’il n’avait jamais été journaliste, mais plutôt une « personne des médias ». La raison ? Même s’il créait du contenu pour le site Web de son organisation et qu’il avait écrit et travaillé comme rédacteur pour un certain nombre d’entreprisesde presse, il disait s’intéresser davantage au « lecteur » qu’à « l’histoire ». 

Un journaliste canadien a parlé du manque de ressources pour faire un « travail important » et des demandes pour créer plus  d’articles-listes du type « 10 choses que vous pouvez faire » parce que les rédacteurs en chef pensent qu’ils sont populaires.

Un autre a fait remarquer : “On peut passer tellement de temps à écrire un article d’investigation qui n’obtient qu’un seul partage et l’histoire d’un chaton en obtient des centaines. » 

Un journaliste indépendant a déclaré que les nouvelles sont désormais « ce que les gens veulent lire ». 

Ce que les journalistes croient être une pratique idéale et le travail qu’ils font réellement ne s’alignent pas toujours, et cet écart est le point central du projet JRP. 

« L’une des principales contributions de notre projet est qu’il déplace l’attention de l’idée des rôles professionnels comme des comportements acquis, vers celle des rôles professionnels comme socialement construits, composés d’idéaux et aussi de pratiques », a déclaré Mellado. 

Traditionnellement, la pratique journalistique a été compartimentée. Mais de nombreux journalistes interrogés lors de la première vague de JRP n’entraient pas dans les paradigmes traditionnels, et l’importance qu’ils accordaient à des rôles spécifiques n’avait que peu de rapport avec l’exercice de ces rôles. 

Par exemple, le rôle d’infodivertissement, qui consiste à créer du contenu visant à distraire le public, avait une présence mondiale plus importante que le rôle de service dans le contenu analysé. L’infodivertissement n’était pas confiné à un type particulier de journal ou de secteur, mais s’étendait à plusieurs sujets et contextes culturels.

La première vague a révélé que les rôles journalistiques deviennent hybrides dans un contexte où l’on attend des journalistes qu’ils couvrent davantage de terrain, et où ils travaillent souvent comme pigistes. 

« Ils travaillent pour différents organes de presse, ils produisent des articles dans différents domaines et écrivent pour différents publics en même temps, il est donc logique de penser qu’ils négocient constamment leurs idéaux avec des situations qui nécessitent la combinaison de performances spécifiques », a déclaré Mellado.

« Parfois, ils sont des chiens de garde, d’autres fois des amuseurs, parfois ils entendent remplir une fonction de service, et d’autres fois ils font tout cela en même temps. »

Bien que les rôles changent ici au Canada, il n’y a pas autant de polarisation des médias que dans certains pays, notamment aux États-Unis, ni des restrictions aussi importantes que dans les systèmes médiatiques où les gouvernements contrôlent la circulation de l’information.

On constate également chez les journalistes canadiens (?) un large consensus sur l’importance des idéaux journalistiques tels que la vérification et le travail pour partager des informations basées sur des preuves.

« Le domaine journalistique est très normatif par nature, dictant ce qui peut être considéré comme du « bon » ou « mauvais » journalisme », souligne Mellado. « À mon avis, l’excès de normativisme ne nous aide pas à comprendre comment le journalisme redéfinit continuellement ses règles dans des logiques et des temps historiques différents. Les normes évoluent aussi. » 

Les pratiques journalistiques sont complexes, comme le suggèrent les recherches sur l’utilisation des métriques et des données analytiques dans les salles de rédaction. Par conséquent, Mellado a souligné que les rôles journalistiques ne devraient pas être étudiés hors de leur contexte : « La pratique journalistique s’inscrit dans des contextes organisationnels et industriels façonnés par des facteurs sociaux : économiques, politiques et culturels. Cette idée relève du bon sens, mais elle n’est pas encore suffisamment reconnue. » 

Bien que la première vague de JRP ait été riche en apprentissage, les chercheurs ont reconnu que l’étude initiale présentait des limites importantes, notamment le fait que seul le contenu des journaux était analysé. C’est la raison pour laquelle la deuxième vague actuelle se fonde sur un échantillon multiplateforme, analysant le contenu des journaux télévisés et radiophoniques, des sites Web et des journaux. 

Selon Mellado, un autre problème de la première vague de l’étude était que seules les nouvelles « sérieuses » (hard news) étaient examinées, ce qui empêchait de comprendre comment les rôles professionnels peuvent se manifester différemment dans d’autres domaines. 

Cette fois-ci, tous les types de nouvelles sont analysés, de la politique au mode de vie en passant par le divertissement, et, par conséquent, un plus grand nombre de journalistes ont été interrogés.

Enfin, la professeure Mellado a identifié une limite dans l’échantillon de pays impliqués dans l’étude originale ; il n’y avait aucun pays d’Océanie, du Moyen-Orient ou d’Afrique. Maintenant, il y a une représentation de chacune de ces régions et même « différentes régions qui font la différence au sein de chaque région ou continent ». 

L’étude canadienne comporte toutefois des éléments uniques. L’enquête comprend une section sur les conditions de travail et le rôle des journalistes pendant la pandémie, ainsi qu’une composante qualitative comprenant des entretiens avec certains des journalistes dont le travail est analysé, ainsi qu’une observation limitée des salles de rédaction avant la pandémie.

L’ensemble des données internationales collectées par l’étude JRP est d’une importance vitale pour comprendre le domaine du journalisme, en constante évolution, et pour mieux appréhender l’impact, ou le changement d’impact, des différents systèmes médiatiques sur la pratique journalistique. Dans une autre publication soulignant les résultats de la première vague, les chercheurs ont conclu que, désormais, « la pratique peut différer plus clairement entre les journalistes et les organisations médiatiques qu’entre les pays. » 

D’un point de vue canadien, le projet JRP fournira un aperçu essentiel de la pratique journalistique au Canada pendant la période sans précédent de la pandémie. Outre le matériel nécessaire à l’analyse du projet JRP, les chercheurs canadiens ont également recueilli des données supplémentaires sur tous les sites canadiens étudiés de janvier à juin 2020, en documentant les corrections et les notes de l’éditeur, le rapport entre le contenu original et le contenu tiers publié ou diffusé, ainsi que des données temporelles liées au nombre de jours pendant lesquels les articles performants sont conservés sur les pages d’accueil des sites Web, créant ainsi un riche ensemble de données sur la production journalistique. 

Grâce à l’étude JRP, les chercheurs canadiens espèrent mieux connaître l’évolution des rôles des journalistes et des créateurs de contenu, dans le but de mieux comprendre quelles compétences devraient être enseignées dans les écoles de journalisme. 

En combinant l’étude de la production de nouvelles et la recherche sur les rôles professionnels, les résultats permettront aux professionnels du secteur et aux éducateurs de réfléchir de manière critique aux récits théoriques de la pratique par rapport à la performance réelle, afin de mieux examiner comment les journalistes peuvent servir au mieux le public. 

« Les normes sont utiles pour construire des discours de légitimité professionnelle », a déclaré Claudia Mellado, « mais nous ne devrions pas penser au journalisme dans l’abstrait, et nous ne devrions pas faire de déclarations absolues sur la relation entre la pratique du journalisme et des concepts qui sont très liés à la culture, comme la démocratie, l’objectivité ou l’autonomie. »

Traduction: Colette Brin, assistée par DeepL.com

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Nouvelles

Tout le monde est le bienvenu, tout le monde a sa place

by Nicole Blanchett June 14, 2022
written by Nicole Blanchett

Du processus éditorial ascendant à la priorité donnée à la diversité, en passant par l’utilisation de pratiques marketing traditionnelles pour élaborer des articles journalistiques, HuffPost Canada était un innovateur du numérique. Puis il a été fermé.

Mes entretiens et observations au HuffPost faisaient partie de la collecte de données pour le projet Journalistic Role Performance, un effort international entre 37 pays pour explorer s’il y a un écart entre les idéaux journalistiques et la pratique. 

Après avoir recueilli des milliers d’articles en 2020, puis les avoir codés et avoir interrogé les journalistes des organismes de presse qui ont produit ces articles, nous en sommes maintenant à l’étape de l’analyse. Et, par coïncidence, nous avons saisi quelques-uns des derniers jours du HuffPost Canada.

Une explosion du passé

Ma première carte de visite, pour mon premier poste de producteur.

Juste avant le premier confinement de la pandémie de COVID-19, j’ai observé les pratiques dans la salle de rédaction du HuffPost. Avec ses planchers en bois, ses hauts plafonds, ses briques apparentes et sa lumière naturelle abondante, la salle de rédaction avait un aspect et une ambiance différents de ceux de nombreux organismes de presse traditionnels. Cette sensation me rappelait beaucoup CityTV Toronto, lorsqu’elle était située sur Queen Street West, où j’ai travaillé comme productrice et rédactrice de nouvelles télévisées dans les années 1990 et au début des années 2000. L’une des raisons en était le personnel jeune et diversifié. CityPulse News, comme on l’appelait à l’époque, a été la première à faire un effort pour refléter la communauté qu’elle servait. 

Dans une interview réalisée par les étudiants de mon cours de journalisme de première année, le présentateur de CBC, Dwight Drummond, m’a rappelé que lorsque nous travaillions ensemble à CityTV, la devise de la salle de rédaction était “tout le monde est le bienvenu, tout le monde a sa place”. Il a ajouté que, pour la première fois, le fait d’être une personne racisée ayant grandi en logement social était considéré comme un atout.

La diversité dans les salles de rédaction s’est peut-être quelque peu améliorée en quelques décennies, mais il reste encore beaucoup de chemin à parcourir, comme l’indique un rapport de l’Association canadienne des journalistes, selon lequel près de la moitié des salles de rédaction canadiennes emploient exclusivement des journalistes blancs, environ 9/10 ne comptent aucun journaliste latino, originaire du Moyen-Orient ou métis, 8/10 aucun journaliste noir ou autochtone et 2/3 aucun journaliste asiatique. 

Tant au HuffPost qu’à City, l’accent mis sur la diversité ne s’arrêtait pas aux personnes chargées du reportage ou du découpage des articles, mais se répercutait sur l’utilisation des sources et des experts. Un rédacteur du HuffPost a déclaré,

« Notre grande particularité est de normaliser la diversité. Nous n’avons pas de sections spéciales, nous le faisons tout simplement – et si cette approche peut influencer d’autres médias, c’est un marqueur de succès pour nous. »

Culture de la salle de rédaction

En ce qui concerne la hiérarchie de la salle de rédaction, il y a une « différence frappante » dans la pratique au HuffPost, selon une journaliste qui travaillait auparavant pour un ancien journal. Dans son précédent emploi, le processus éditorial était complètement descendant. Les décisions concernant les sujets qu’elle couvrait étaient basées sur ce que les rédacteurs en chef pensaient devoir être publié. Au HuffPost, elle avait ses propres idées. Un autre employé a déclaré que tout le monde « était encouragé à contribuer et à innover, et même à exprimer son désaccord s’il estimait qu’une histoire était inappropriée ».

Lors d’une réunion éditoriale à laquelle j’ai assisté, on a beaucoup parlé de ce qui était tendance, de la façon dont les termes des moteurs de recherche pouvaient être exploités pour attirer les lecteurs, et de la façon dont les médias sociaux pouvaient être utilisés pour promouvoir à la fois les histoires et l’engagement avec des segments particuliers du public. Cependant, il y a également eu beaucoup de discussions sur la politique, y compris un article d’investigation provenant d’Ottawa. 

Un participant d’un autre média a reconnu que HuffPost Canada faisait du bon travail, mais a demandé pourquoi il faisait partie de notre recherche. Il a déclaré qu’ils étaient « nationaux » uniquement parce que n’importe qui pouvait « cliquer dessus », mais que leur impact en termes de contenu était « plutôt mince ». 

Ce point a été reconnu par le HuffPost. Un rédacteur en chef a déclaré qu’il s’agissait d’une petite équipe et qu’il n’y avait « aucune illusion » qu’ils pouvaient tout couvrir. Ils s’appuient sur des agences comme la Presse Canadienne pour les histoires pour lesquelles ils n’ont pas les ressources nécessaires, et encouragent les journalistes à se concentrer sur ce qui les passionne et à développer des histoires « mémorables ». 

Il a souligné qu’ils ne cherchaient pas seulement à obtenir des « clics bon marché » et que c’était leur marque de commerce d’agir comme contre-pouvoir et de donner une voix aux sans-voix. Cependant, il a également déclaré qu’il n’y avait aucune honte à réaliser des histoires virales et qu’il ne comprenait pas pourquoi elles étaient en quelque sorte considérées comme « sales » ou qualifiées de « clickbait ». Il les a comparés à l’histoire ‘écureuil qui fait du ski nautique au journal télévisé – j’ai écrit sur cet écureuil plus d’une fois à City. Les taux d’audience étaient importants à l’époque et le sont encore aujourd’hui – de manière générale, le trafic web était un impératifau HuffPost.

Donner un visage au public et aux journalistes

L’analyse préliminaire de nos données JRP montre quelques différences notables dans les articles de HuffPost Canada par rapport aux autres organismes de presse de notre étude, notamment une plus grande prévalence de l’utilisation de la première personne et du point de vue du journaliste. Bien que des recherches récentes montrent que la majorité des consommateurs de nouvelles préfèrent un style plus traditionnel et impartial, les publics plus jeunes et/ou de gauche sont plus ouverts à ce style, et il semble que c’est ce que ciblait HuffPost Canada. 

Sur la base des données d’audience, il avait créé des lecteurs imaginaires, dont Adam, un « millénaire moyen » qui avait un partenaire nommé Taylor, et Adela, une « jeune millénaire » qui était sur Insta à 22 heures. Les journalistes étaient censés utiliser cet entonnoir d’audience de style marketing pour mettre un visage à leur public cible avant de commencer à écrire un article. 

Le HuffPost a reconnu que des sujets tels que l’éducation des enfants, qui peuvent être considérés comme plus légers ou moins importants que la politique par d’autres organes d’information, étaient vraiment importants pour leurs lecteurs. Un rédacteur en chef a déclaré que son rôle était de veiller à ce que toutes les informations soient transmises de manière à aider les gens à prendre des décisions intelligentes dans leur vie quotidienne. Deux questions importantes se posent :  « En quoi cela me concerne-t-il et pourquoi devrais-je m’en soucier ? » Nous appelions cela news you can use quand j’étais à CityTV.

Elle a déclaré que la position de « natif numérique » du HuffPost était basée sur le fait d’agir comme un « grand égalisateur » dans la distribution de l’information, parce que l’information n’était pas « seulement pour les personnes qui peuvent se permettre des abonnements à des journaux ou qui ont peut-être atteint un certain niveau d’éducation ou de compréhension de la lecture ». Le Reuters Institute for the Study of Journalism a noté que le fait de ne servir que les consommateurs d’informations les plus éduqués et les plus aisés, ainsi que l’utilisation de murs payants, constituaient des préoccupations croissantes.

Comprendre comment l’information circule numériquement, suivre un processus propriétaire d’optimisation des moteurs de recherche et amplifier le contenu par le biais des médias sociaux faisaient partie du travail de chacun, tout comme la création d’une communauté. Sur une page Facebook consacrée au logement, par exemple, les informations étaient partagées quelle que soit leur origine, y compris celle d’autres organismes de presse. En outre, ils répondaient toujours aux corrections suggérées par les lecteurs pour essayer de montrer un « visage humain. »

L’esprit d’équipe

Le souci de l’engagement a également été intégré dans les pratiques de présentation des articles. Un rédacteur en chef a fait remarquer qu’au lieu de qualifier un sujet de « politique », on pourrait utiliser une autre expression plus vivante, comme « jeter le blâme » ou « pointer du doigt » . La journaliste du HuffPost mentionnée précédemment a noté la pression supplémentaire liée à la nécessité de présenter ses articles et de penser au référencement. Lorsqu’elle a dit qu’elle apprenait encore mais qu’elle s’améliorait, quelqu’un d’un autre bureau lui a crié d’un ton encourageant : « Tu le fais ! ». 

Ce sentiment de camaraderie était visible à de multiples occasions. Comme l’a fait remarquer un autre rédacteur, « si quelqu’un a un projet plus important sur lequel il travaille, les autres se mettent au travail pour l’aider » – cela fait partie de la gestion de ressources limitées, mais c’est aussi la preuve d’une équipe soudée.

Je suis sûre qu’il y avait des inconvénients à travailler au HuffPost Canada. Je n’ai pas eu l’occasion d’y passer suffisamment de temps pour avoir une vue d’ensemble, en particulier pour ceux qui travaillaient à contrat ou à la pige. Et quiconque a travaillé dans la salle de rédaction à Toronto pendant la période où j’y étais pourrait dresser une longue liste de problèmes graves. Mais ces deux salles de rédaction avaient des priorités bien ancrées qui peuvent être transposées à d’autres : amplifier la diversité des voix, établir un lien avec la communauté et rompre avec les formats et les pratiques traditionnels afin d’impliquer le public. 

Lorsqu’on lui a demandé de décrire l’impact de la fermeture de HuffPost Canada, un participant à l’étude a envoyé cette réponse par courriel :

« Nous avons combiné la pertinence et l’irrévérence, en nous amusant avec les nouvelles lorsque c’était approprié, et en enquêtant  avec nos talents éditoriaux considérables lorsque c’était possible. Nous donnions la priorité aux perspectives des diverses communautés, nous recherchions – et mettions en vedette – les voix que l’on n’entend pas souvent. Les Canadiens voient moins cela sans les contributions de HuffPost Canada au paysage médiatique. C’est ce que je ressens comme la plus grande perte, et j’espère qu’à mesure que nos journalistes et rédacteurs en chef sont recrutés par d’autres médias, ce changement sera bientôt visible ailleurs. »

Je l’espère aussi.

Une version éditée de cet article a été publiée précédemment, en anglais, sur The Conversation Canada.

Traduction: Colette Brin, assistée par DeepL.com

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